Je ne vais pas dévoiler la fin du livre, mais j'ai trouvé
passionnante la description du milieu rural du jeune héros. Je
m'y suis bien retrouvé dans les quelques pages qui décrivent
la vie au séminaire, par petites touches très légères.
Les noms des professeurs ont été modifiés. Les
anciens saurez-vous rétablir les bonnes identités ?
(court extrait en attendant l'autorisation de l'auteur que je n'arrive
pas à joindre. L'adresse de son site personnelle n'est plus correcte).
Le père supérieur s'adressa
pour la première fois à l'ensemble des séminaristes
lors de la prière du soir, dans la chapelle. François
avait suivi Gaston qui le précédait sur les rangs. Il
avait gravi les gradins disposés de part et d'autre de l'allée
centrale, s'était tourné comme lui vers l'autel, bras
croisés, attendant le signal du claquoir pour s'agenouiller.
Le père Béduneau était un homme de petite taille
au visage volontaire et à l'allure énergique, le crâne
chauve couronné d'une chevelure grisonnante coupée court.
Il se découvrit de sa barrette et la posa avec son bréviaire
sur le portillon de la sainte table. Il serrait dans sa main gauche
sa montre oignon, la chaîne passée autour de son poignet.
Il promena lentement son regard perçant à travers les
gradins, s'attardant davantage sur les nouveaux venus.
- Je ne vous connais pas encore tous, dit-il enfin. Cela viendra. Je
voudrais m'adresser d'abord à ceux qui sont venus rejoindre notre
famille. Vous allez être prêtres...
Ces mots prononcés par le père supérieur dans ce
silence religieux frappèrent François comme un coup de
poing. Il ne s'était jamais placé dans une perspective
si proche. Il se demanda soudain comment, dans sa folie, il s'était
placé dans les mâchoires du piège qui venait de
se refermer sur lui. Il se rappela sa mère se défaisant
de son tablier au moment de son départ comme lorsqu'il arrivait
du monde. Elle l'avait embrassé et s'était mise à
pleurer à lourds sanglots.
François sentit les larmes lui monter aux yeux. Il refusa de
s'apitoyer. Il récita avec ferveur la dizaine de chapelet que
le père supérieur dirigeait. Il admira la beauté
des voix d'enfants et d'hommes mêlées de la chorale qui
entonna le Tota pulchra es de Dom Pothier. Il eut envie d'être
de ces chanteurs debout dont les regards sautaient la tranche rouge
du paroissien pour suivre à la fois la mesure du maître
de choeur et les notes sur la portée.
L'année s'ouvrit sur une retraite de trois jours. Le missionnaire
demanda aux séminaristes de partir pour le désert. Il
les pria de fermer les yeux pendant que l'organiste jouait le Tantum
ergo de J.S. Bach, et leur chuchota: " Imaginez-vous dans la cathédrale,
le jour de votre ordination. Vous êtes allongés sur les
dalles. Votre évêque vous appelle... " Il conta l'histoire
du petit saint Louis de Gonzague, jouant à la balle avec ses
camarades. On lui demanda ce qu'il ferait si on lui annonçait
qu'il allait mourir dans une heure. " Je continuerais de jouer
à la balle! " François décida de se confesser
au père. Il prépara un billet de confession avec ses péchés
ordinaires suivis d'un tiret et d'un large blanc. Il resta muet lorsqu'il
arriva au blanc.
Il s'adapta sans effort au règlement du séminaire gouverné
par la sonnerie de la cloche. [...]
la suite peut-être avec l'autorisation d'Yves.