De la fondation par le Père Baudoin.
Début du chapitr II du livre "Du Sang des
fleurs".
Ce livre m'avait plu en 6ème. Je
l'ai entendu aussi au réfectoire. Actuellement je ne m'ennuie
pas en le relisant. Son style m'amuse beaucoup... Voici, pour commencer
la situation des prêtres au début de la révolution.
(le Père Baudoin était en exil en Espagne pendant la
guerre de Vendée... Il avait un sacré tempérament).
L'orage.
Déjà la Révolution commençait.
Le 6 Novembre, l'Assemblée Constituante dépouillait
l'Eglise de France de tous ses biens. Le 12 Juillet 1790, cette même
Assemblée, poursuivant son oeuvre sacrilège, votait
la Constitution civile du Clergé dont le but évident
était de détacher la France de l'Eglise catholique.
Le 6Janvier, les évêques et les prêtres devaient
prêter serment à cette Constitution. Ceux qui refusèrent
de s'y soumettre furent appelés réfractaires ou insermentés.
Ceux qui, au contraire, par ignorance ou par ambition, consentirent
à donner leur signature, reçurent le nom d'assermentés
; mais, dans l'Ouest tout au moins, le peuple ne les désignait
guère que sous le nom de- prêtres "jureurs".
Les premiers étaient violemment destitués de leur charge,
les seconds invités à se présenter au suffrage
du peuple pour remplir les places vacantes.
Confesseur de la foi.
Les prêtres jureurs furent rares en Vendée.
L'abbé Louis-Marie Baudouin repoussa ce serment schismatique
de toute l'énergie de son âme. Bien plus, la profession
de foi et les protestations motivées dont il accompagna son
refus eurent le don d'exaspérer les membres du district. Ils
s'emportèrent et vomirent d'horribles blasphèmes. Une
sainte indignation s'empara alors du jeune prêtre " Messieurs,
leur dit-il, je vois bien que si vous aviez fait partie du tribunal
qui condamna Jésus-Christ à mort vous ne vous seriez
pas abstenus. " - " Non, certainement, répondit l'un
d'eux, ils étaient dans le système de la légalité.
" Parole impie, qui met à nu le fanatisme de ces misérables.
L'abbé Baudouin venait de se désigner à la malveillance
et aux représailles des autorités révolutionnaires.
Un fait ne tarda pas à leur donner l'occasion de les exercer.
Un intrus à Luçon.
La Constitution civile du Clergé remettait la
nomination des Evêques au corps électoral. Au diocèse
de Luçon, un prêtre ne craignit pas de poser sa candidature
à l'évêché constitutionnel de Vendée
; ce fut Rodrigue, curé de Fougeré. Il fut élu,
consacré, et, quelques jours après, soutenu par la garde
nationale, il faisait à Luçon son entrée solennelle.
L'abbé Louis-Marie Baudouin, malgré sa jeunesse, ne
consultant que l'ardeur de son âme apostolique, résolut
de tout tenter pour éveiller les remords. dans le cur
de Rodrigue et l'empêcher, s'il était encore possible,
de consommer son forfait. Pendant le trajet, il lui fit parvenir un
billet. Ce billet contenait les paroles de reproche de Notre-Seigneur
à Judas: " Amice, ad quid venisti ? Mon ami, pourquoi
êtes-vous venu ? " L'apostat reçut le coup et continua
sa marche. M. Baudouin lui fit remettre un second message, avec ces
autres paroles du Sauveur " Judas, osculo Filium hominis tradis
! M Judas, tu trahis le Fils de l'homme par un baiser ! "
Hélas ! le coeur de Rodrigue était rempli de trop d'orgueil
et d'ambition pour écouter ces graves reproches. Rien ne put
l'arrêter. Il se rendit à l'évêché
et s'y installa. Après quoi, payant d'audace, il alla se présenter
à la cure de Luçon. Il espérait sans doute gagner
à sa, cause les Messieurs Baudouin. Mais, fidèles au
conseil de l'EspritSaint, de n'avoir aucune communication avec les
apostats, les deux frères interdirent au prêtre coupable
l'entrée de leur maison.
Vous n'avez aucun pouvoir !
Dès lors, M. Louis-Marie Baudouin fut en butte
aux poursuites d'une police tracassière et brutale, recrutée
parmi les plus tarés de la lie du peuple.. L'entrée
de l'église lui était interdite. Il disait la messe
et confessait dans une cave qu'une famille courageuse avait mise à
sa disposition. Ce n'était, hélas ! que le commencement
de cette vie de prêtre traqué et proscrit qu'il devait
mener pendant huit ans.
Défense lui était faite pareillement de reparaître
à l'hôpital. Mais, en temps de persécution, le
zèle se fait industrieux. Malgré l'étroite surveillance
dont il était l'objet, il réussit pendant quelques semaines
encore à parvenir au chevet des mourants.
Prévenu qu'un malade en danger de mort le demandait, il s'y
rendit sans plus tarder, insouciant des rigueurs auxquelles il s'exposait.
Rodrigue l'avait devancé. N'écoutant que son zèle,
il s'avança vers l'intrus, le bras tendu pour lui montrer la
porte : " Vous n'avez aucun pouvoir, s'écria-t-il avec
indignation ; vous ne pouvez pas, sans sacrilège, administrer
les sacrements, et il ne sera pas dit que vous les aurez profanés
en ma présence. " Devant une telle fermeté, l'intrus
n'osa pas résister - les malades, d'ailleurs, prenaient parti
pour leur aumônier qu'ils aimaient - il s'enfuit tête
basse, la rougeur au front, la haine au cur, jurant de se venger.
En prison pour Jésus-Christ
La vengeance de Rodrigue ne se fit pas attendre. Quelques
heures après, l'abbé Louis-Marie Baudouin était
signalé à la police, arrêté et conduit
sous bonne escorte à la prison de Fontenay-le-Comte. C'était
le premier prêtre de Vendée emprisonné pour son
attachement à la sainte Eglise.
Toutes les situations sont bonnes aux vrais apôtres
pour travailler , au salut -des âmes. L'abbé Baudouin
regarda tout de suite la prison comme un nouveau champ d'apostolat
que la divine Providence l'invitait à cultiver. Il n'avait
autour de lui que des malfaiteurs, il chercha à gagner leurs
âmes à Dieu. Hélas ! son zèle et ses exhortations
se heurtèrent à des curs endurcis et obstinés
; il ne réussit pas à les. convertir. Il s'attira du
moins leur confiance ; volontiers, ils lui contaient leurs prouesses
et le mettaient dans le secret de leurs projets. " Dans la troupe,
aimait à raconter le bon Père avec son aimable gaieté,
je distinguai avant tous les autres un vieux routier dont l'il
vif et résolu me frappa ; je lui dis avec intérêt
: " Et vous, l'ami, qu'est-ce donc qui vous amène ici
? - C'est, me répondit-il, qu'il y a -du tutu dans mon affaire.
" - Ah ! je vois que vous êtes un voleur de chevaux. "
- "Précisément, Monsieur l'Abbé. "
- " Combien pensez-vous en avoir pris, trente, quarante ? "
- " Oh ! bien plus que cela. ! -Si je ne me trompe pas, j'en
ai pris plus de onze cents. " - " Comment, onze cents !
il y a donc longtemps que vous faites le métier ? " Oui,
mais j'en suis las et je veux vivre en honnête homme. "
- " Et comment ferez-vous ? " - " Voici : je passerai
en Angleterre ou j'ai des fonds placés, puis, je retournerai
dans mon pays que j'ai quitté jeune avec la réputation
d'un honnête garçon. Alors, je me mettrai dans le commerce
et je vivrai tranquille ; car, dans le métier que je mène,
voyez-vous, il y a de mauvais quarts d'heure à passer. Mes
camarades et moi nous allons passer - quelques jours ici pour nous
reposer ; puis nous prendrons la clef des champs. Nous avons pratiqué
un trou dans ce mur ; ce trou est recouvert par une botte de paille
sur laquelle l'un de nous reste couché quand le geôlier
vient faire sa visite. Si vous voulez vous sauver avec nous, Monsieur
l'Abbé, nous vous conduirons en toute sécurité
où vous jugerez bon. " - " Grand merci, mon ami,
répondit le saint prêtre, j'attendrai ici les moments
de la Providence. Je vous souhaite un bon voyage. " Une belle
nuit, en -effet, les " chers camarades " délogèrent
sans tambour ni trompette, comme ils l'avaient dit ; le geôlier
ne se réveilla que le matin. Je crois q'on me soupçonna
fort d'avoir conspiré, au moins par mon silence. Je m'en aperçus
à la surveillance plus sévère que l'on exerça
contre moi à partir de ce moment. "
Hélas ! le départ de ses chers camarades ne le laissa
point seul. Depuis quelques semaines, la prison s'était remplie
de prêtres venus de tous les points du département. Parmi
eux, se trouvait le curé de Maillé, M. Herbert, octogénaire,
que son grand âge ne devait pas préserver de l'échafaud.
Retour à Luçon ! Sauvé. Suspect
Relâché au bout de sept mois, il revint
à Luçon se remettre au service des âmes. Mais,
comme il devait s'y attendre; les révolutionnaires l'eurent
bien vite reconnu. Un jour, plusieurs d'entre eux le poursuivirent
et il n'eut que le temps de se réfugier dans la maison d'un
royaliste de ses amis. La porte se referma au moment Où le
sabre de l'un de ces misérables s'abattait sur lui. Du coup,
la porte vola en éclats ; mais déjà, heureusement,
M. Baudouin s'était échappé
[pour la suite, acheter le livre où l'emprunter
à la source ? je trouve ce livre jubilatoire...]
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